Lorsque les époux s’entendent sur le fait de rompre leur union et sur les conséquences de cette rupture (ce qui est d’autant plus facile s’ils sont jeunes, sans patrimoine et enfants), c’est la solution la plus rapide et la moins coûteuse. Elle est d’ailleurs plébiscitée par les couples.

Quelques avantages et inconvénients du divorce sans juge

Les avantages de l’ancienne formule (le consentement mutuel avec juge qui, pour rappel, n’existe plus aujourd’hui qu’en présence d’enfant mineur demandant à être entendu dans la procédure) avaient depuis longtemps été mis en évidence :
- rapidité ;
- coût réduit ;
- liberté accrue des époux quant aux mesures qu’ils souhaitent prendre ;
- « dédramatisation » de la séparation.

Ces atouts se retrouvent dans le divorce sans juge. En ce qui concerne la rapidité, en l’absence de convocation judiciaire, ce divorce est a priori encore plus vite accordé. D’un point de vue strictement procédural, le seul délai à respecter pour le couple est celui de réflexion après étude du projet.

En pratique cependant, les époux sont privés, par définition, du contrôle du juge. Leur vigilance et celle des professionnels qui les accompagnent (avocats et notaires), déjà de mise dans sa version judiciaire, s’impose d’autant plus ici.

Si, à première vue, la procédure semble simple et rapide, elle est en réalité alourdie par le fait qu’il est en pratique obligatoire d’avoir liquidé son régime matrimonial avant même le lancement de la procédure. Plus généralement, l’idée du texte est de concentrer (comme pour sa version judiciaire) le principe de la séparation et le règlement de toutes ses conséquences – et elles sont nombreuses - sur lesquels le couple doit s’entendre. La convention signée par le couple doit en effet prévoir « les modalités du règlement complet des effets du divorce, notamment s’il y a lieu au versement d’une prestation compensatoire » ainsi que l’état liquidatif du régime matrimonial (ou la mention qu’il n’y a pas lieu à liquidation) (art. 229-3, C. civ.).

Il s’agit donc pour le couple de convenir au fil des rendez-vous avec les professionnels :

- du règlement de leurs intérêts financiers (paiement d’une prestation compensatoire, sort des donations à venir, du logement familial, etc.) ;
- d’avoir fait établir l’acte liquidatif s’il y a lieu ;
- des autres aspects de leur séparation : notamment port du nom marital, devenir des enfants (lieu de résidence, modalité des droits de visite et d’hébergement, possibilité d’une résidence alternée et sa fréquence, pension alimentaire), etc.

Notons par ailleurs que plusieurs difficultés se sont faites jour quant à l’application de cette réforme faisant reposer l’ancien contrôle des juges sur les épaules des avocats et, dans une moindre mesure, des notaires.

Car c’est une première dans notre droit d’avoir un divorce, de nature hybride, prenant la forme d’un contrat, contresigné par des avocats et enregistré par un notaire. Il est donc le fruit d’un travail conjoint du couple et de ces professionnels qui successivement, ou en même temps selon les cas, conseillent les époux.

Par exemple, les questions suivantes se sont posées à propos du divorce sans juge :
- quels sont les champs de compétence respectifs des professionnels (notaires et avocats) en matière de contrôle de la convention de divorce ? 
- qui va vérifier si l’enfant est capable de discernement (ce qui interdit aux parents d’utiliser le divorce sans juge s’il demande à être entendu) ?
- les époux (ou l’un d’eux) pourront-ils revenir sur la convention enregistrée, par exemple en cas d’erreur ou de fraude ?

Certaines réponses ont été apportées, via des circulaires et réponses ministérielles, voire d’une charte signée entre représentants des avocats et notaires (l’idée étant de mieux fluidifier les rapports entre ces professionnels).

Un document émanant du Conseil supérieur du notariat (CSN) dresse un bilan de la situation et propose plusieurs pistes d’amélioration (source CSN rapport 2022 : Le divorce par consentement mutuel 5 ans après).

Pour en revenir à la question de la rapidité du divorce, il faut bien se rendre compte que les rendez-vous, en amont de la signature des documents de divorce, permettant d’en sécuriser le contenu, peuvent contribuer à en ralentir le déroulé.

Plus généralement, elle va dépendre en toute logique de la situation en présence : existence ou non d’enfant, d’un patrimoine, etc.

Quant au coût, contrairement à sa version judiciaire, chaque époux doit ici prendre un avocat. Le coût du divorce en sera par là même renchéri. Ne prendre qu’un avocat était un avantage non négligeable dans l’ancienne formule de divorce par consentement mutuel avec juge (et largement utilisé) qui n’existe plus ici. L’idée du texte étant de compenser l’absence de regard judiciaire par la présence de deux professionnels du droit. Par ailleurs, l’intervention du notaire est rendue obligatoire pour enregistrer l’acte. Dans la version judiciaire, elle ne l’était qu’en présence d’un bien immobilier. Notons que le tarif d’enregistrement de la convention chez le notaire (formalisme obligatoire) est plafonné à 41,20 € (art. A 444-173-1, C. com.).

Plus généralement, c’est le divorce où les époux ont les plus grandes libertés (sous le contrôle des professionnels) pour l’organisation de leur après-divorce (par exemple, sur les modalités de règlement de la prestation compensatoire).

Pour autant, il faut noter que cet avantage est susceptible de se retrouver dans les divorces contentieux puisque les couples sont incités à s’entendre, dès le début de la procédure sur certaines conséquences du divorce et à faire homologuer leur accord par le juge.

Les chiffres du divorce

Il est toujours intéressant de se pencher sur les chiffres actualisés du divorce. Le grand bouleversement dans notre législation a été l’introduction, depuis le 1er janvier 2017, du consentement mutuel sans juge. Ce type de divorce rebat les cartes et devient le divorce majoritairement choisi par les couples.

Si l’on reprend le rapport 2022 du Conseil supérieur du notariat (CSN), sur l’année 2020, on compte pour 57 453 divorces judiciaires (57 920 ruptures dont 467 séparations de corps), les proportions suivantes :
- 65 divorces par consentement mutuel judiciaires ;
- 33 943 divorces acceptés ;
- 17 114 divorce pour altération définitive du lien conjugal ;
- 5 517 divorces pour faute.

Par comparaison, cette même année 2020, le CSN décompte 52 601 conventions de divorces par consentement mutuel sans juge (en 2021, 71 144) (source CSN rapport 2022 : Le divorce par consentement mutuel 5 ans après).