Est-ce qu'un enregistrement est valable en justice ?

Vincent Guillaume
2025-08-02 00:30:18
Nombre de réponses
: 15
Un enregistrement d’une discussion privée était considéré comme une preuve déloyale s’il avait été fait sans le consentement des participants.
Ainsi, l’enregistrement de conversations téléphoniques à l’insu de la personne enregistrée constituait un procédé déloyal rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue.
Les juges devaient rechercher si la personne enregistrée avait donné son consentement à cet enregistrement.
L’enregistrement de cette discussion privée avec un tiers à la procédure en divorce a donc été écarté des débats, c’est-à-dire que le juge n’en a pas tenu compte pour prendre sa décision.
C’est d’ailleurs dans ce sens que la Cour d’appel de PARIS est allée dans son arrêt du 23 mars 2021 qui a d’abord rappelé le principe selon lequel l’enregistrement d’une conversation privée à l’insu de la personne enregistrée constituait un procédé déloyal rendant ce moyen de preuve irrecevable.
Puis cette même Cour d’appel a précisé que toutefois, il pouvait en être autrement lorsque la production de cet enregistrement privé était indispensable à l’exercice du droit de la preuve de la personne qui la verse aux débats et qu’elle était mise en œuvre de façon proportionnée au regard de l’objectif recherché.
Les enregistrements de conversations privées ayant eu lieu entre époux dans la sphère de leur intimité (à leur domicile) peuvent être admis comme moyen de preuve recevable à la condition que leur production en Justice soit indispensable à l’exercice du droit de la preuve et proportionné à l’objectif recherché, à savoir la démonstration de violences physiques, psychologiques ou encore sexuelles ou économiques.

Valentine Roger
2025-08-01 22:22:20
Nombre de réponses
: 12
Un juge peut-il néanmoins accepter un enregistrement non connu de l’interlocuteur comme mode de preuve?
L’illicéité d’un moyen de preuve n’entraîne pas nécessairement son rejet des débats, le juge devant apprécier si l’utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle d’un salarié à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi.
Cet arrêt vient donc tempérer considérablement le rejet des enregistrements effectués à l’insu de la personne enregistrée.
Ce rejet n’est donc plus automatique.
Le juge dispose d’un pouvoir d’appréciation et de contrôle de la proportionnalité de la preuve, notamment lorsque le plaignant justifie d’une impossibilité de prouver autrement son préjudice.

Étienne Hardy
2025-08-01 20:11:05
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: 13
La dégradation des conditions de travail, et la recrudescence des situations de harcèlement, nous avaient conduits dans un précédent article à nous interroger sur la valeur juridique d’un enregistrement réalisé à l’insu d’un interlocuteur dans le cadre d’un entretien. Le SNALC s’était alors interrogé sur la recevabilité et la valeur probante d’un tel enregistrement.
Par deux arrêts particulièrement commentés du 22 décembre 2023, l’Assemblée plénière de la Cour de Cassation a opéré un revirement de jurisprudence, en acceptant désormais que le juge civil puisse tenir compte, sous condition, d’éléments de preuve obtenus de manière déloyale.
Un arrêt du 14 février 2006 a précisé que les enregistrements clandestins, qui n’interviennent pas dans un contexte de vie privée mais à l’occasion de rapports professionnels, ne sont pas punissables pénalement. La Haute Juridiction a ainsi retenu que ne constitue pas une atteinte à la vie privée, l’enregistrement d’une conversation téléphonique par l’un des interlocuteurs à l’insu de l’autre, lorsque celle-ci porte sur l’activité professionnelle.
Selon le SNALC, une telle réponse serait hypocrite car les rectorats admettent les enregistrements clandestins comme preuve contre leurs personnels, notamment lorsqu’ils sont réalisés par les élèves. Le Rectorat de Nice a ainsi réalisé, pour les besoins d’une procédure disciplinaire, une transcription d’un enregistrement clandestin d’un professeur réalisé par un élève.
Enfin, il convient de rappeler que les juridictions pénales ne posent en principe aucune difficulté à accepter tout mode de preuve émanant d’un particulier, même si celle-ci a été apportée de manière déloyale. La seule exigence posée par les textes ainsi que par la jurisprudence est que ces enregistrements doivent être en mesure d’être débattus contradictoirement entre les parties.
Le grand changement réside dans le fait que les parties ont toute liberté désormais de produire en justice des enregistrements clandestins et c’est le juge qui, après en avoir pris connaissance, décide de les retenir ou de les écarter.
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